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samedi 17 janvier 2015
Par l’étude d’objets fonctionnels, de procédés de fabrication et des gestes d’usages qu’ils impliquent, Nicolas Momein s’approprie des méthodes de travail qu’il détourne dans le façonnage de ses propres sculptures. Ses œuvres conservent la charge du savoir-faire qui les structurent et redonnent une place à des techniques et métiers souvent peu visibles. Dans l’espace des églises, il réalise une pièce monumentale en suspension, animée de renflements. Un accident contrôlé, exploitant les propriétés du matériau employé, déforme une toile tendue et modèle un relief inversé. Issue de chaînes d’interactions et de rencontres, la sculpture fait appel aux compétences particulières d’une entreprise locale. Cette forme placée en hauteur n’est pas sans évoquer une certaine transcendance, déjouée par la trivialité des moyens de production qui sous-tend l’ensemble de l’exposition.
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Les « pièces » que Nicolas Momein réalise pour son exposition aux églises, dans l’immédiat de leur perception, travaillent à établir les conditions d’une manifestation.
Pourtant, il y a comme un mystère, une énigme, un insondable de la matière qui se montre. Qui affleure, pour être plus exact : les formes se donnent ici par le grain, c’est-à-dire ce qui travaille leurs surfaces, ce qui autorise qu’elles en soient le revêtement, l’épithélium.
Une manifestation qui, pour le coup, recouvre – autant qu’elle revêt donc – une dimension organique. Et qui fait présence. Il y a dans ces « pièces » comme un état d’existence que l’on ressent à regarder leurs volumes, comme une force qui les modèlent de l’intérieur, dans une économie ou une écologie ou un savoir-faire – sans que l’on sache – qui, s’ils nous sont diffus, les génèrent bien par ailleurs. Leurs corps constitués résonnent silencieusement donc de ce qui les a travaillés, de ce qui les travaille encore.
C’est un peu comme si, l’oreille collée à l’écorce d’un arbre, il nous était permis de saisir le glissement inaudible de la sève au coeur des tissus xylémiques ou phloémiques et oeuvrant à l’émergence des formes, selon des développements tout autant centripètes que centrifuges.
La porosité opère. Éponge. Mousse. Lichen. Loofah. Fibre. Texture. Relief. Grain. Gravité. Élévation. Suspension. Verticales. Couleur. Forme. Propos. Rythme.
Ces « pièces » sont comme autant d’objets « déposés » – car rien ne semble relever d’une physionomie désignée qu’une fabrication ou qu’une mécanique de production viendrait magnifier. Elles recouvrent le secret de leur fabrique en s’éloignant pour cela, forcément et étrangement, du corpus rassurant des choses.
De leur manifestation ne s’établit aucune fonction. Elles sont là. Magnétiques. À l’atelier. Ici exposées.
« Dans (…) un mouvement d’éléments en tous sens : par terre, à hauteur d’homme, au plafond… Tout cela je le saisis au passage. Pas le temps de contempler… »
Mais, oui, celui de les regarder.
Eric Degoutte, commissaire de l’exposition
Robert Linhart, L’Établi, Édition de Minuit,1978.
Le site de l’artiste : www.nicolasmomein.com
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