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L’art contemporain
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prisonnier d’une oligarchie
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Par Edwin Juno-Delgado
Le Monde | 20.10.2015
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Qui n’a jamais entendu, à la sortie d’une exposition d’art contemporain, prononcés des commentaires du genre « La plupart des œuvres sont, comment dirais-je, “particulières” », « Quels étaient ces objets bizarres ? », ou encore « Pour aimer ces horreurs, il faut être ou bien un ignorant ou bien un érudit… et comment je ne suis ni l’un ni l’autre je n’aime pas l’art contemporain ! ».
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Voilà qui exprime le ressenti sincère du public. Car, limpide de toute analyse scientifique et de toute sorte d’expertise ou de positionnement doctrinal, l’impression juste après un évènement illustre bien la valeur que chaque personne octroi à une manifestation artistique ou culturelle. Se confronter à l’art contemporain et ensuite en parler n’est pas chose facile pour le commun des mortels. Parce qu’il dérange, réveille les consciences, trouble nos structures mentales sur l’art construites autour de l’esthétique et du beau.
À l’origine de l’art contemporain, il y a une révolte contre cette dictature du beau et du traditionnel. Car pour les enfants terribles de l’art, les artistes contemporains, la « dictature du beau » – historique et mondialisée – avait fini pour étouffer l’esprit créatif. La première génération des jeunes artistes contemporains avait trouvé son inspiration dans cette folle envie de casser les principes de l’harmonie, de détourner la théorie des couleurs, la maitrise des matériaux, bref de mener une véritable rupture avec des formes dites classiques.
La révolution en train de se museler
De ce fait l’art contemporain était révolutionnaire. Cependant, quelques années plus tard, on commence à se demander si ladite révolution n’est pas en train de se museler avec la créature qu’elle-même avait engendrée. Nous savons pertinemment que le risque de toute révolution triomphante et de donner naissance, par la suite, à un monstre, une nouvelle dictature.
Il est particulièrement vrai dans l’art contemporain car pour exister il a besoin que la dialectique créatrice « destruction-construction » soit maintenue en permanence sinon la porte est ouverte au conservatisme, au sentiment de déjà-vu. Deux phénomènes semblent aller dans ce sens : le nombre restreint d’artistes reconnus sur l’espace artistique contemporain et le poids de l’argent sur le marché.
D’après une étude réalisée par Artprice, parmi les 49 000 artistes contemporains recensés aux enchères, uniquement dix artistes se partagent 35% des recettes globales, et même trois artistes 18%. Vu le cercle exclusif des artistes contemporains reconnus et admirés partout dans le monde, on peut se demander si l’art contemporain est rentré dans sa phase de destruction. Car ces dix noms sont devenus aujourd’hui une espèce d’oligarchie artistique, une caste dominante qui gouverne et dicte les commandements de la création contemporaine. Le premier symbole du déclin de l’art contemporain se trouve là.
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